17 de junho de 2010

PIPOL NEWS 3

PIPOL NEWS 3

Le 28 mai 2010

PIPOL 5

La Santé mentale : un concept en question

Au Square Brussels Meeting Centre, Bruxelles

Les 2 et 3 juillet 2011




Dans ce numéro :

Éditorial

Il n’est pas donné à tout le monde d’être dingue

Judith Miller de Paris, France

Trouver son pas, voire sa passe

Vicente Palomera de Barcelone, Espagne

Salud Mental y razas de goce

Lucia D’Angelo de Barcelone, Espagne

La salud mental, Un ¿concepto? en cuestión

Patricia Bosquin-Caroz de Bruxelles, Belgique

La règle singulière, une dinguerie ?



Los textos de PIPOL NEWS están escritos en una de las siguientes lenguas : inglés, francés, italiano, español. Si desea hacer una traduccion rápida, utilice el sitio : http://translate.google.fr

The textes of PIPOL NEWS are written in one of the following languages: English, French, Italian, Spanish. To get a fast translation, go to : http://translate.google.fr

I testi di PIPOL NEWS sono scritti in una di queste lingue: Inglese, Francese, Italiano, Spagnolo Per avere une traduzione rapida, potete utilizzare il sito : http://translate.google.fr

Les textes de PIPOL NEWS sont écrits dans une des langues suivantes : Anglais, Français, Italien, Espagnol. Pour une traduction rapide, utilisez le site : http://translate.google.fr



« Pourquoi ne peux-tu pas être non-conformiste comme tout le monde ? »

(Une femme à son mari)




Éditorial

Il n’est pas donné à tout le monde d’être dingue

Dès le départ, PIPOL 5 articule le débat sur la Santé mentale avec ce qu’on peut appeler « l’envers de la Santé mentale », à savoir la « dinguerie » de chacun, que nous appelons dans notre langage technique : le sinthome. Ce numéro de PIPOL NEWS fait place à cet aspect en publiant pour commencer une note de Judith Miller sur la « dinguerie » de Pascal.

Les textes de Lucia D’Angelo et de Vicente Palomera s’inscrivent dans le questionnement de la Santé mentale comme appareil du discours du maître. Ces deux textes partent de la définition que Jacques-Alain Miller a donné il y vingt ans, selon laquelle « la Santé mentale est l’ordre public ».

Lucia D’Angelo nous montre que cette définition est toujours d’actualité. Elle nous invite à extraire et définir les termes cliniques et théoriques en jeu dans ce débat entre la psychanalyse et le discours du maître.

Vicente Palomera souligne la jouissance ségrégative incluse dans tout jugement opéré par la Santé mentale. Les jugements de valeur induits par les troubles que la Santé mentale repère dans la population ne sont pas du même ordre de ce que nous appelons les « dingueries ». D’un point de vue psychanalytique, les « dingueries – sinthomes » ne sont pas soumises à des jugements de valeur.

Sur la « dinguerie » de chacun, le texte de Patricia Bosquin-Caroz montre que ce dont il s’agit n’est pas une liberté folle du discours. Il ne s’agit pas d’un « dire n’importe quoi » qui se justifierait par un « ben quoi ? C’est ma dinguerie à moi ». Ce n’est pas non plus une mise en scène du fantasme, ni une mise en acte de la jouissance. La dinguerie dont il s’agit est une dinguerie articulée à un effort de formuler l’expérience la plus privée dans un langage public.

Ceci n’est pas chose facile, car du côté du standard phallique et œdipien, il y a un effort de traversée à fournir pour accéder à un bout de « dinguerie ». D’ailleurs, à l’occasion, le mur du standard est si épais, qu’il est impossible à franchir. Par contre, en deçà de l’Oedipe, il s’agit plutôt de construire sa dinguerie, ce qui n’est pas un travail moins exigeant.


Gil Caroz

Trouver son pas, voire sa passe

Judith Miller, Champ freudien


Il est urgent de répondre à l’invitation à introduire des « dingueries » dans PIPOL NEWS. Cette urgence prime sur une autre, celle de lire le décret d’application de l’article 52, enfin sorti[1]. Je ne le déchiffrerai pas aujourd'hui. Quelqu’en soit la teneur, il ne pourra en effet empêcher quiconque, titré ou pas, de savoir que nous vivons dans un monde où il serait fou de ne pas être fou, comme sa « dinguerie » a permis à Pascal de le pointer (les Lefort le considéraient autiste comme bien d’autres) .

Cette « dinguerie » de Pascal se situe au moment où est ressenti « l’effroi » devant « le silence des espaces infinis ». Elle lui permet de mettre en marche le calcul des probabilités et des statistiques... Pour celles-ci, la psychanalyse est étrangère, même si elles sont incontournables pour qui traite de « populations », ce que ne fait pas la psychanalyse.


Pipol, Programme international de recherche en psychanalyse appliquée d’orientation lacanienne, est gai, car il dit, au fil de ses thématiques et de ses inventions, pourquoi nous mettons en question, avec Pascal, la Santé mentale et apprécions la « dinguerie » de chacun. Cette dinguerie, nous l’apprécions, en tant que singulière. Nous travaillons à ce qu’elle ait droit de cité, parce que nous ne sommes ni des CRS, ni des généraux en chef, ni des serfs volontaires : nous aimons que chacun marche à son pas et dans son style et nous nous gardons de mettre quiconque au pas. La psychanalyse d’orientation lacanienne en travaillant au cas par cas, permet à chacun de trouver son pas, voire sa passe. C’est à cela que nous tenons, et ce sur quoi l’ensemble du Champ freudien ne cède pas et ne cèdera pas. Il forme pour ce faire de joyeux bataillons sur la base du transfert à la Cause freudienne. Ils sont joyeux de ce que la puissance d’être de chacun en est augmentée.



Salud Mental y razas de goce

Vicente Palomera, ELP


En el curso de una presentación de enfermos en el Hospital psiquiátrico Sta. Isabel de León, el pasado fin de semana, tuve la ocasión de interrogar a un sujeto que había empezado a construir un delirio de envenenamiento, a los cinco años de edad, a raíz de un encuentro con la figura “transfigurada” y amenazante del padre, quien, al regresar a su casa después de cinco años de ausencia, producto de la emigración, había proferido, refiriéndose a los hijos : “…pero ¿de qué raza han salido estos (los hijos)?” En sus numerosos pasajes al acto suicidas acabaría asignando al pueblo gitano la voluntad maligna hacia él, manifiesta en los diversos intentos de asesinarlo a lo largo de su vida. Luego, una necesidad apremiante de generalizar hasta el extremo dicha certeza inundará toda su existencia, arrastrado por el poder de seducción de dicha interpretación inaugural.

Después de esta presentación, surgieron entre los presentes reflexiones sobre el carácter segregativo de los diagnósticos cuando intentan captar el ser del sujeto, es decir cuando llegan a petrificarlo bajo el significante de un diagnóstico. Este sujeto decía tener “una paranoia tan pura que no deja equivocarme" (sic). Esa era su certeza. Nombrarse como una “paranoia pura” era un modo de enjuiciar el goce del Otro y al usar este diagnóstico se servía de él como un pararrayos frente al goce mortífero que lo asediaba.

Si seguimos esta perspectiva, podríamos decir que las nociones de salud o de enfermedad mental implican siempre un juicio de valor y que son por ello segregativas. Decir de alguien “sano” o “enfermo” implica hacer un juicio de valor.

Así es como Lacan llegará a hablar de un racismo propio de cada uno de los discursos. En efecto, cada discurso tiene una vertiente segregacionista (1). Cada discurso ordena el goce y cada orden limita el goce (en la medida en que todo discurso impone un limite al goce).

La máxima expresión de dicha limitación del goce sería precisamente el “orden público”, como lo señaló J.-A. Miller en una conferencia, en Sevilla: “la salud mental no tiene más definición que la del orden público”. (Miller, J.-A., Introducción a la clínica lacaniana, Conferencias en España, RBA, Barcelona, 2006).

En resumen, cada discurso ordena, limita un goce, pero eso supone, también, que excluye otro y es por eso que podemos decir que todo discurso determina una “raza de goce”(2), puesto que determina la homeostasis del goce de los sujetos que entran en él, condicionando el juicio de uno sobre otro. Es en este sentido que decimos que todo diagnóstico de “salud mental” supone un juicio de valor y que, como todo juicio, supone un fantasma. En definitiva, el juicio de salud mental es un modo de goce.


Notas

(1) En El Seminario 17, El reverso del Psicoanálisis, Lacan destaca que "en la sociedad… todo lo que existe está fundado en la segregación", "Nunca se ha terminado completamente con la segregación [...] Nada puede funcionar sin ella…. Es el efecto del lenguaje". "Sólo conozco un origen de la fraternidad…. Es la segregación". "Incluso no hay fraternidad que pueda concebirse sino es por estar separados juntos, separados del resto, no tiene el menor fundamento, como acabo de decirles, el menor fundamento científico".

(2) En su texto L´Etourdit, Lacan nos presenta su noción de raza: "me explico, la raza de que hablo no es la que una antropología sustenta por decirse física. La raza se constituye por el modo en que se trasmiten según el orden de un discurso los puestos simbólicos, los puestos con que se perpetúa la raza de los Amos y no menos la de los esclavos”.

Vemos pues que la raza se constituye por el modo de transmisión de los puestos simbólicos según el orden de un discurso. Este implica un orden establecido en el campo de lo Real por la vía del lenguaje. Un discurso permite establecer un orden entre lugares y entre los elementos que vienen a ubicarse en esos lugares.



La salud mental

Un ¿concepto? en cuestión

Lucia D’Angelo, ELP


El concepto, según Lacan, está determinado por la función que tiene en una praxis. Si se trata del concepto de salud mental, este concepto rige la manera de tratar de los pacientes y a la inversa, la manera de tratarlos rige el concepto.

Más tarde, Lacan da una definición más precisa de concepto en tanto que deja una huella en lo real. Es un hecho que la salud mental no es un concepto psicoanalítico, es un concepto que viene del Otro, un significante Amo, que conviene problematizar en el contexto actual.

La OMS define la salud mental como un estado de bienestar en el cual el individuo es consciente de sus propias capacidades, puede afrontar las tensiones normales de la vida, puede trabajar de forma productiva y fructífera y es capaz de hacer una contribución a su comunidad.

La dimensión positiva de la salud mental se destaca en la definición de salud que figura en la Constitución de la OMS: «La salud es un estado de completo bienestar físico, mental y social, y no solamente la ausencia de afecciones o enfermedades».

Estos datos y cifras ponen de relieve los aspectos más importantes de la salud mental y de los trastornos mentales.

La salud mental abarca una amplia gama de actividades directa o indirectamente relacionadas con la promoción del bienestar, la prevención de trastornos mentales y el tratamiento y rehabilitación de las personas afectadas por dichos trastornos. [OMS. Octubre 2009]

Sin embargo, las precisiones de la Organización Mundial de la Salud (OMS) establecen que no existe una definición "oficial" sobre lo que es salud mental y que cualquier definición al respecto estará siempre influenciada por diferencias culturales, asunciones subjetivas, disputas entre teorías profesionales y demás.

La apelación al campo freudiano - que es el nuestro - requiere que pongamos el término mismo de salud mental en cuestión y problematicemos su estatuto como concepto. Actualicemos nuestras referencias para dar las respuestas que conviene en el uso que hacemos de la salud mental para el psicoanálisis.

Un texto memorable de Jacques-Alain Miller, de hace más veinte años, “Salud mental y orden público”1, merece una lectura obligada para la actualización de nuestras referencias. No sólo en el debate político con los estamentos y reglamentaciones del Estado sino en los argumentos epistémicos y clínicos donde se asientan las bases de nuestra posición. Para J.A. Miller : “La salud mental no tiene más definición que la del orden público”.

Definición que propone para sintetizar las sospechas o incluso el desdén expresado en ocasiones hacia el concepto de salud mental desde el punto de vista psicoanalítico.

De esta forma la salud mental definida según el orden público parece ser el criterio más evidente de la pérdida de salud mental que se pone de manifiesto en la perturbación de ese orden.2

Han pasado veintidós años desde entonces.

Primera cuestión: ¿En los últimos veinte años ha cambiado algo de esa sospecha o desdén que se atribuye al psicoanálisis sobre el concepto de salud mental? En todo caso ¿cuáles han sido los efectos de nuestras respuestas para incidir en esos prejuicios?

La salud mental es parte del conjunto del orden público, sin embargo, esta equivalencia no parece suficiente dado que los trabajadores de la salud mental se reconocen próximos a la policía y la justicia. De donde J.A. Miller, propone la responsabilidad como un concepto esencial en la distribución de la salud mental, el orden público y el psicoanálisis.3

Segunda cuestión: ¿Son los psicoanalistas trabajadores de la salud mental en las instituciones donde mayoritariamente ejercen su práctica?. En todo caso ¿no convendría aún, investigar sobre las enseñanzas del psicoanálisis aplicado a la institución y distinguirlo del psicoanalista en la institución?

En este punto, según J.A. Miller, podemos tomar como punto de partida una posición unívoca: “el psicoanalista, como tal, no es un trabajador de la salud mental y quizás sea éste, precisamente, el secreto del psicoanálisis, más allá de la justificación que hagamos en términos de utilidad pública.”

Dado que el psicoanálisis no puede existir más que en un estado de derecho, el psicoanálisis es un tratamiento que se dirige al sujeto de pleno derecho; un sujeto cuya enunciación responde de su enunciado.

La salud mental - el orden público – la responsabilidad – el derecho – la respuesta son las coordenadas que propone J.A. Miller para que el psicoanálisis tome en cuenta para sus embates con el Estado y con su concepto de salud mental.

Tercera cuestión: ¿En que momento estamos en este combate entre el psicoanalista lacaniano y el Estado?. ¿Cómo incidir con nuestras armas, con la potencia del discurso analítico frente al discurso del Amo, dado que en última instancia deriva de él?.

Comencemos nuestro debate desde ahora que nos dirija hacia el encuentro de Pipol V : “Salud mental. Un concepto en cuestión”.


1. Miller, J.A.: « Salud mental y orden público” (1988), en Introducción a la clínica lacaniana. Conferencias en España, Colección ELP- RBA, Director de la colección, Vicente Palomera. Barcelona, 2006, P. 119.

2. Miller, J.A.: ibídem, p. 119

3. Miller, J.A.: op. cit ., p. 120/121

4. Miller, J.A.: op. Cit., p. 122



La règle singulière, une dinguerie ?

Patricia Bosquin-Caroz, ECF


Nous étions au lendemain du Congrès de l’AMP qui s’est tenu à Comandatuba en 2004 et à la veille de la Rencontre européenne du Champ freudien, PIPOL 2. À l’époque, le Champ freudien se mobilisait déjà pour faire valoir la pertinence de la psychanalyse contre l’expansion des pratiques brèves comportementalistes. La Rencontre européenne du Champ freudien, PIPOL 2 s’intitulerait : « Les effets thérapeutiques rapides en psychanalyse ». Après 2003, date fatidique où se révéla l’Autre évaluateur auquel le champ psy aurait dorénavant affaire, le Champ freudien allait répondre par une contre-offensive à la culture avérée du chiffre et du nouveau scientisme qui faisait rage. Dans ce fil, avec PIPOL 5, la future Eurofédération de psychanalyse met aujourd’hui en question le concept même d’une Santé mentale bonne pour tous et sans reste que promeut l’hédonisme contemporain, en faisant valoir le sel de la psychanalyse : la singularité de chacun que nous désignons, reprenant l’expression à Bernard Henri Lévy, par les termes « ma dinguerie à moi ».


Quelques années plus tard, je me souviens de l’intervention d’Éric Laurent à ce Congrès de l’AMP 2004, s’inscrivant dans le mouvement de cette contre-offensive. Je voudrais réactualiser son propos qui vient aujourd’hui à point nommé. Il s’agit de l’intervention qui porte le titre « Du langage public au langage privé, une topologie du passage ». Elle avait fait suite aux exposés de 3 AE lors de ce Congrès.


Dans son intervention, Éric Laurent soulignait que ces exposés d’AE nous montraient le chemin de retour de l’expérience privée vers la place publique de la langue et du débat commun. Je le cite : « Chacun commence par chuter de son identification maîtresse. Il est d’abord drop out d’un discours. Dans un second temps, les sujets veulent retrouver une place dans l’Autre en s’adressant à lui. Ils le font à partir de l’expérience privée de l’être de jouissance qui est traversée ». L’entrée sur la place publique se fait à partir de l’expérience la plus privée. Le chemin vers l’extérieur passe par le plus intérieur. Cependant, dans l’expérience psychanalytique l’espace public n’est pas à confondre avec l’universel. L’ex-sistence du sujet y fait obstacle. C’est ce dont les AE témoignent, c.-à-d. comment ils se coupent de l’identification à l’universel, plus profondément spécifie É. Laurent, comment par le chemin de la séparation d’avec l’Autre, le sujet retrouve avec l’objet a, le chemin qui le relie à cette communauté de la conversation publique. Autrement dit, isoler son mode de jouir et en faire ensuite un usage créatif, soit s’en servir, c’est ce que l’on peut attendre d’une psychanalyse menée à son terme. L’idée en est qu’à partir du sinthome, soit du plus singulier de chacun, le parlêtre peut faire lien social.


Cette topologie du passage du public au privé et retour est une réponse de la psychanalyse à la question du lien paradoxal entre le sujet et l’Autre. Pas de production du sujet sans l’Autre. É. Laurent se référait au cours « Donc » de JAM où celui-ci distinguait l’abord psychanalytique du langage, de la conception du langage du second Wittgenstein.1 Pour le dire rapidement et extraire ce qui nous intéresse ici, Wittgenstein réfute l’existence du langage privé au sens d’une langue pure dépourvue de règles. Les règles grammaticales déterminent la signification qui ne l’est pas déjà, elles la constituent. Le langage est une pratique, un usage de la règle. Comprendre n’est alors rien d’autre que suivre une règle. Selon JAM, là où Wittgenstein cherchait la règle pour comprendre pour tous, ce qu’on aperçoit dans l’analyse, c’est que la règle pour comprendre est à chacun particulière, c’est ce qu’on appelle le fantasme. Elle se dégage sur le fond d’un parler sans règles, qui est la règle de l’association libre.


La traversée du fantasme de la Proposition de J. Lacan de 67 ou la réduction du mode de jouir que constitue aujourd’hui le sinthome traduiraient que « se découvre dans une analyse l’arbitraire de la règle du dire, à savoir que la règle aurait pu être autre ». Le sujet qui peut dire légitimement « donc je suis analysé », c’est celui qui rendrait compte de la règle qui lui est singulière, c.-à-d. de ce que les mots veulent dire pour lui, règle toujours contingente. Ainsi, le savoir qui se dégage d’une analyse est un savoir qui ne s’appréhende pas de l’extérieur, mais de l’intérieur. Les AE, appelés à témoigner, démontrent en acte cette topologie du passage du public (identifications) au privé (objet a) et retour.


Si comme le soulignait Éric Laurent, les interventions des AE constituent une contribution au débat qui anime notre époque, la question se pose alors de savoir en quoi elles pourraient nous orienter dans le champ de la psychanalyse appliquée. Ce débat de l’époque, on sait qu’il concerne l’évaluation quantitative des pratiques psys, sa mesure, son réglage. C’est à cette offensive évaluatrice que s’était proposé, dans la suite des forums, de répondre le Champ freudien avec PIPOL 2, PIPOL 3, PIPOL 4 et aujourd’hui PIPOL 5. Dans le fond que s’agit-il de faire passer dans l’opinion, sinon le fait qu’en psychanalyse nous savons aussi compter ! Pas en observant, mesurant, chiffrant de l’extérieur. Plutôt, en faisant valoir qu’en psychanalyse, on ne peut pas observer de l’extérieur ce que fait quelqu’un, on ne peut pas, dit JAM dans « Donc », déterminer avec certitude la règle à laquelle il obéit. « S’il écrit 2, 4, 6, 8, on se dit qu’il suit la série des nombres naturels en ne prenant que les nombres pairs. Mais il peut en fait obéir à une règle plus sophistiquée qui consisterait, par ex., au bout de 4 chiffres présentés à prendre les nombres impairs pour les 4 suivants, pour après revenir aux pairs. Autrement dit, on ne peut conclure que l’on connaît la règle, la surprise est toujours possible ».


C’est ce que Lacan démontre très bien, dans son Séminaire « L’angoisse », à propos du robinet de Piaget. Là où l’expérimentateur attend l’enfant avec son système d’explications de règles valables pour tous, soi-disant transmissibles, sans perte, l’enfant est lui, pendant ce temps, tout occupé avec sa propre règle, à savoir celle qui viendrait répondre de ce qui se passe dans son corps quand s’ouvre un robinet. C’est précisément, nous dit Lacan, ce que l’expérimentateur ne voit pas.


Faire valoir la règle singulière dans le débat où seule prévaut la règle universelle du toujours et du pour tous, constitue un enjeu de taille. Car la règle singulière n’entre pas dans le champ de la prévision, mais n’est jamais repérable qu’après-coup. En psychanalyse, la surprise, l’invention, la contingence sont toujours au rendez-vous. Aujourd’hui avec PIPOL 5 la règle singulière se dénomme « ma dinguerie à moi ». Comme pour un Witz, la dinguerie de chacun ne se passe pas de l’Autre, car il faut pour qu’elle soit un bon mot, être entérinée par cet Autre que Freud désignait du terme Dritte Personne. Dans la passe, le sujet en fin de parcours analytique s’adresse à l’École, il attend de cet Autre qu’il sanctionne sa trouvaille, son invention, sa dinguerie créative. Pas d’invention sans un Autre de l’adresse. L’expérience de la passe, que Lacan a voulu pour son École, nous enseigne comment PIPOL pourrait se faire le lieu d’accueil des bons mots, des dingueries bien dites de chacun, sachant que le bien-dire relève de l’éthique analytique. PIPOL 5 aurait alors à se faire passeur du bien-dire des sujets qui s’adressent aux praticiens orientés par la psychanalyse afin de redonner ses lettres de noblesse à la parole singulière toujours plus écrasée par la barbarie scientiste du 21e siècle.


1. MILLER J.-A., « Donc », Cours du 19 janvier 1994, inédit.




[1] voir ECF-Messager du 20 mai.

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